« Je suis venu, j’ai vu, j’ai vaincu ». Je suis certain que la formule choc de Jules César pour résumer l’une de ses victoires éclair en Asie mineure pourrait s’appliquer de nos jours, moyennant une petite adaptation, au pilotage mondial d’une supply chain. Rendons d’abord à César ce qui lui appartient : cette transposition anachronique, aussi incongrue qu’elle puisse paraître, aurait sans doute passionné le grand Jules, à qui l’on attribue notamment la création dans les légions romaines de la fonction « logista », chargée d’approvisionner les campements (en livraisons nocturnes, déjà) à partir de dépôts d’approvisionnement. Le tout sans APS ni WMS, évidemment. Imaginons-le juste un instant chronoporté à notre époque. D’après vous, que dirait-il en découvrant la puissance des solutions de suivi temps réel des marchandises sur toute la planète à l’aide d’objets connectés ? Il en perdrait peut-être son latin pour s’exclamer en VF : « Avec l’IoT, j’ai vu, j’ai vaincu ! »
Le côté « vidi », c’est-à-dire la notion de visibilité sur les flux, est depuis toujours une composante critique du pilotage de la logistique et de la supply chain. Sauf que la donne a changé récemment, avec l’arrivée des trackers IoT, des réseaux longue portée et basse consommation comme LoRa et Sigfox, et des plateformes digitales capables d’agréger et d’analyser des masses considérables d’informations et de remonter des alertes en temps réel. Il suffit pour s’en rendre compte de considérer les innovations dont Supply Chain Magazine se fait l’écho dans sa newsletter quotidienne depuis un an : les solutions de tracking temps réel apparaissent en très bonne place, avec les systèmes d’automatisation et de robotisation. Deux projets emblématiques parmi huit finalistes, en l’occurrence ceux portés par Michelin et par Air Liquide, ont du reste été retenus cette année par le jury des Rois de la Supply Chain 2019, dont la finale aura lieu le 17 janvier prochain.
Avec ou sans l’IoT, cette digitalisation de la gestion des opérations de transport international, auquel nous consacrons ce mois-ci un dossier, ouvre de nouvelles perspectives en matière de services clients, de visibilité sur les taux de fret et d’optimisation des coûts et des stocks sur tous les maillons de la supply chain. Le fait de disposer suffisamment à l’avance de l’information concernant un retard éventuel sur l’arrivée d’un conteneur donne en effet le temps de réaffecter certaines livraisons en fonction du degré de priorité, sans pour autant surstocker. Avec des économies et des avantages concurrentiels à la clé. S’il avait disposé d’un tel arsenal de solutions de visibilité, Jules César n’aurait peut-être pas eu besoin de « venir » pour « voir » puis « vaincre » !