Avec ces retards industriels annoncés par les laboratoires dans la livraison de leurs vaccins, l’importance du métier de responsable Supply Chain saute désormais aux yeux du grand public, et espérons-le aussi des politiques. Entendons-nous bien, mon propos ici n’est pas de jouer les procureurs mais de souligner combien cet art est difficile. Car on a beau nous avoir préalablement expliqué que 200 M de vaccins ont été précommandés pour une livraison tout au long de l’année 2021, il n’en reste pas moins vrai que toute la campagne et sa logistique associée sont aujourd’hui chamboulées par le fait que Pfizer et AstraZeneca ne seront pas capables de suivre la cadence de production prévue. Cela illustre bien la différence entre la pure logistique, longtemps assimilée au transport par le monde politique, et le supply chain management, appelé aussi logistique étendue, qui porte sur la gestion collaborative et la synchronisation des flux de marchandises et d’information, depuis les fournisseurs jusqu’aux clients. Cela suppose de réfléchir le plus en avance possible aux stratégies d’achats de matières premières, d’anticiper les montées en cadence de la production, de réfléchir en amont aux meilleurs options d’organisation pour le stockage et le transport en fonction du taux de service visé. Pour pallier les risques de pénurie, le gouvernement s’est employé à encourager la sous-traitance de la production de vaccins en France, mais le processus en cours prend plusieurs mois. Une autre piste consiste à extraire une sixième dose de chaque flacon, mais cela nécessite des seringues spéciales… qui pourraient constituer le prochain goulot d’étranglement. En tout cas, quand tout cela sera derrière nous, vous n’aurez aucun mal à expliquer à vos amis ce qu’est le supply chain management, il vous suffira de leur rappeler les débuts de la campagne vaccinale. Jean-Luc Rognon