« D'une année sur l'autre nos prévisions se dégradent, et nos usines ont du mal à s'adapter à la demande », me confiait la semaine dernière un professionnel de la cosmétique. En cause, le rôle déterminant des réseaux sociaux sur la vente de certains produits : « dans le domaine de la beauté, plusieurs blogueuses exercent une influence considérable, expliquait mon interlocuteur avec désolation. Dans de nombreux pays, elles sont considérées comme des stars pouvant déplacer des foules, lorsqu'elles se prêtent - par exemple - à des séances de dédicace dans les boutiques ». Loin d'être un cas isolé, ce témoignage n'est que l'illustration d'un mouvement amorcé depuis plusieurs années. Que l'on s'en réjouisse ou qu'on le déplore, les réseaux sociaux occupent désormais une place importante dans le comportement d'achat des consommateurs, ce qui ne manque pas de perturber les prévisionnistes les plus aguerris. Certes, depuis longtemps, le public est influencé par les campagnes promotionnelles, les conférences de presse, les actions commerciales sur le terrain, la publicité… Mais tout ceci était soigneusement étudié, encadré, planifié. Avec les réseaux sociaux et la possibilité offerte à tout un chacun de s'exprimer à partir de n'importe quelle webcam installée dans une cuisine ou une salle de bain, c'est différent. Le discours marketing des grandes marques vole en éclat lorsqu'un youtuber, suivi par des centaines de milliers de fans admiratifs et disciplinés, décide de torpiller ou d'encenser un produit. Que peuvent les logiciels de prévision quand les historiques sont confrontés à l'explosion irrationnelle des références qui font le buzz sur la toile ? Et tous les produits de grande consommation sont, ou seront concernés. Même s'il existe des réponses pour coller au plus près de la demande (le DDMRP en est une), il reste qu'il est souvent difficile pour les sites industriels, surtout lorsqu'ils sont loin, de réagir dans des délais courts à des mouvements aussi inattendus qu'une pluie de sauterelles s'abattant sur un champ de blé. Visibilité, agilité, flexibilité, sont plus que jamais les maîtres mots pour adapter une Supply Chain aux évolutions de ce monde volatile et incertain. JP. Guillaume